La préparation de nos États Généraux bat son plein et l’aventure est particulièrement enthousiasmante. L’équipe, qui s’est déjà réunie trois fois, fait un véritable travail collectif et nous recevons de toutes parts des encouragements. Vous trouverez les informations — régulièrement mises à jour — dans notre rubrique “organisation des EGR“.
Inquiétudes du côté de la préfecture
Cette préparation inquiète aussi, notamment la cellule DEMETER, mise en place par la préfète de Gironde Fabienne Buccio dans le cadre d’un “observatoire de l’agribashing” (sic) (voir son communiqué). Notre association a été contactée une première fois par téléphone en décembre et elle a reçu une visite à domicile ce dimanche 26 janvier.
- Avons-nous volé des GPS ou des tracteurs ? (puisque c’est ce que prétend surveiller DEMETER)
- Avons-nous fait des tags agressifs ou stigmatisé des agriculteurs ? (puisque c’est aussi ce que prétend surveiller DEMETER)
- Avons-nous mené des « actions de nature idéologique, qu’il s’agisse de simples actions symboliques de dénigrement du milieu agricole ou d’actions dures ayant des répercussions matérielles ou physiques », comme l’écrivait C. Castaner lorsqu’il a lancé cette cellule DEMETER ? On remarquera la troublante confusion dans cette formulation entre le “dénigrement” (la critique ?) “du milieu agricole” (du modèle intensif soutenu par la FNSEA ?) et des actes strictement délinquants.
Non, trois fois non. Sauf si le simple fait d’organiser un débat sur l’usage intensif dans notre région de pesticides dangereux à proximité des enfants, des femmes enceintes, de la population toute entière rentre dans la catégorie “actions symboliques de dénigrement du milieu agricole”, ce qui serait une atteinte inadmissible à la liberté de réunion et à celle d’expression. Des libertés fondamentales en démocratie, tout le monde en conviendra.
Télécharger le dossier de presse du Ministère de l’Intérieur présentant DEMETER.
Alerte téléphonique en décembre
Quelques jours avant notre deuxième réunion de préparation des EGR le 9 décembre à Samonac, nous avons été informés que la gendarmerie de Bourg/Gironde (chef lieu du canton) s’inquiétait. L’un de nos articles, en réponse à un courrier de la Coordination Rurale dénonçant les arrêtés municipaux anti-pesticides, aurait mis en colère des viticulteurs. Le sergent-chef a contacté Henri Plandé, président d’APHG, pour savoir combien de personnes nous attendions à cette réunion, qui étaient-ils, de quoi allions nous parler (ce qui était publiquement annoncé sur notre page Facebook). Il nous a confirmé qu’il y avait un risque que des individus viennent “perturber cette réunion”. Il nous a même donné son numéro de téléphone “au cas où” notre réunion, annoncée publiquement, se passerait mal. Nous n’avons reçu aucune visite désagréable ce soir là.
L’enquête (excellente) menée par une journaliste de Sud-Ouest sur cette situation nous a permis de rencontrer le président de ce syndicat, et de faire connaissance. Nous avons découvert qu’il s’agit d’un viticulteur bio voisin — Lionnel Lorrente — et qu’il n’y avait aucune intention de sa part de nous nuire. Il nous a appris qu’il avait lui aussi reçu, à son grand étonnement, la visite de DEMETER lui intimant de surveiller ses militants pour qu’il n’y ait aucun débordement ce 9 décembre.
Nous avons gagné dans cette affaire un intervenant de plus pour nos EGR puisque M. Lorrente a accepté de participer à la 2ème table ronde. La guerre promise a fait pshitt, comme dirait un regretté président et nous avons conclu à un bug des services de renseignement mal renseignés.
Tout de même, nous sommes rappelés le 11 décembre pour savoir si notre rencontre avec L. Lorrente s’est bien passée. Que de sollicitudes !
Visite en janvier
Nouvel appel le 24 janvier, et cette fois nous comprenons que DEMETER s’est vraiment mise en route (ce que confirme le sergent-chef). Il propose une rencontre à Henri Plandé et rendez-vous est pris dimanche 26 à l’heure du café.
Deux gendarmes se présentent, l’un d’eux porte un énorme pistolet sur la cuisse, et un gilet pare-balle comportant des dizaines de poches gonflées de tubes bizarres (tenue réglementaire, disent-ils). Le sergent-chef rassure “Oui, on vient pour DEMETER, mais nous ne sommes pas là pour vous surveiller.”
Le temps du café est l’occasion d’expliquer les buts de notre association d’une part, et notre condamnation de la tentative d’intimidation que représente DEMETER d’autre part. Nous avons d’ailleurs co-signé une tribune publiée par le magazine Reporterre, condamnant cette opération. Si son but n’est pas de nous surveiller, les questions du sergent-chef sont tout de même assez précises :
- « Il y a aura aussi des viticulteurs conventionnels ? » (ils sont invités)
- « Le 15, n’importe qui pourra témoigner et dire ce qu’il veut ? » (oui, dans la mesure où ils restent respectueux)
- « Vous avez un document sur cette journée ? » (oui, il est sur notre site, sur notre page FB, et nous le remettons ci-dessous)
- « Mais, est ce qu’il y aura des marches dans la ville, des défilés ? » (non, pas cette fois, mais ce n’est pas interdit pour la suite)
Nous sommes à la campagne et les relations sont d’abord des relations humaines. Il n’y a pas de menaces et le sergent-chef conclut la discussion en reconnaissant avec humour que nous ne sommes pas des terroristes et que notre projet est bien d’organiser « un débat calme entre personnes de bonne volonté ». Il précise qu’il n’a pas l’intention d’envoyer 15 fourgons de gendarmes (ouf !) le jour des EGR mais ajoute en partant : « Vous avez mon numéro de téléphone. N’hésitez pas à m’appeler si besoin ».
DEMETER sert-elle à fabriquer des problèmes ?
Dans son communiqué de presse de décembre, présentant la cellule DEMETER, la préfète affirmait que “la dénonciation des produits autorisés … en viticulture par un certain nombre de collectivités ou d’associations, est considérée par beaucoup comme le point de départ des difficultés rencontrées par les agriculteurs qui cohabitent avec des zones résidentielles”.
En Nord-Gironde, l’heure est au dialogue et nous ferons tout pour que cela continue, mais nous ne nous tairons pas. Espérons que le but de DEMETER n’est pas de générer des conflits pour justifier la volonté de répression qui transpirait des propos du Ministre de l’Intérieur lors de sa présentation du dispositif, aux côtés de la présidente de la FNSEA le 13 décembre dernier (étrange, un ministre qui met sa police au service d’un syndicat, non ?).
Nos États Généraux sont la meilleure réponse à ces amalgames et machinations. Nous entendons y démonter que ce sont “ces produits autorisés en viticulture” qui sont “le point de départ des difficultés rencontrées par les agriculteurs” et le point de départ des difficultés rencontrées par les riverains qui les côtoient.
Ce sont eux qu’il faudrait surveiller, fliquer, et dont il faudra faire rapidement le procès, avant qu’ils aient définitivement empoisonné viticulteurs, riverains, lombrics et abeilles, air et nappes phréatiques.
Nous avons attendons nombreux le 15 février pour ce grand moment de démocratie !